Le calendrier des Juifs

Il y a très longtemps, tellement longtemps que nul ne se souvient à quand cela remonte. Il n’y avait rien, nulle part. C’était le néant sans commencement, ni fin. Dieu régnait sur ce rien. On ne pouvait voir, on ne pouvait sentir, on ne pouvait entendre, on ne pouvait prendre. Et puis, un jour, Dieu s’est décidé et il a créé le monde. Alors, tout est devenu différent. Il y a eu des choses à voir, des choses à sentir, des choses à entendre, des choses à prendre. Dieu a contemplé son œuvre mais elle ne lui a pas plu. Il s’est alors résolu à détruire ce qu’il avait créé et à recommencer, recommencer encore sans cependant être jamais satisfait. Alors, en levant les mains en l’air, Il a créé à sa droite, le ciel et à sa gauche, la terre. Cette fois, il avait réussi. Le meilleur des mondes jamais créé existait et c’est dans ce monde que nous vivons aujourd’hui.

Le Terre était bien seule, triste et sombre, déserte aussi, recouverte de mers profondes et de montagnes inamicales. Elle soupirait ... Elle se décida enfin à appeler Dieu :
- Dieu, Tu m’as abandonnée. Tu as gardé le ciel près de toi mais moi, tu m’as chassée. Je suis restée seule avec des pierres noires et de l’eau glacée très loin de Toi !
Dieu était un peu étonné de la réflexion de la terre et se mit à réfléchir. Au bout d’un moment, il lui dit :
- Terre, loin de moi l’idée de te faire de la peine, je pense même avoir trouvé le moyen de t’aider. D’ici peu de temps, tu verras sur ta surface des fleurs et des arbres, de l’herbe et une multitude de plantes. Tu exhaleras mille parfums et tu nourriras les hommes et les animaux. Tu entendras le rire des leurs enfants et tu leur donneras un abri.

Grâce à ces paroles, la Terre fut apaisée. Dieu créa alors le Soleil et la Lune. Dès leur arrivée, le monde tout entier s’emplit de lumière. Le Soleil et la Lune avaient la même grandeur, ils brillaient du même éclat pendant le même laps de temps. Ils avaient tous deux les mêmes pouvoirs et aussi les mêmes droits. Ils alternaient dans le firmament et grâce à leur lever et leur coucher, les hommes étaient capables de mesurer le temps sur la terre. Tout aurait donc été pour le mieux si la Lune s’était contentée de son sort. Hélas ! Elle décida, tout comme la Terre l’avait fait, d’aller se plaindre à Dieu de son sort. Elle était certaine que si Dieu avait écouté la Terre, Il l’écouterait aussi. Elle appela donc Dieu :
- Dieu, pourquoi le Soleil a-t-il autant de lumière que moi ? Tu nous as accordé la même puissance de lumière, la même grandeur. Comment les hommes pourront-ils nous distinguer ?
Dieu était un peu étonné de la réflexion de la Lune et se mit à réfléchir. Au bout d’un moment, il lui demanda :
- Voudrais-tu briller davantage ?
- Non, ce n’est pas ce que je demande. J’aimerais seulement que tu reprennes un peu de clarté au Soleil. Les hommes n’ont pas besoin d’autant de lumière.

Dieu fut bien triste. Il avait mis tant d’amour à créer ce monde et voilà que la jalousie s’installait. Il se doutait bien que s’il ne trouvait pas une solution rapide, son œuvre serait détruite. Il se tourna vers la Lune et lui dit :
- Tu as raison, la Lune. Vous ne pouvez pas être égaux le Soleil et toi. Je vais changer une partie de toi-même en milliards d’étoiles et ton éclat se perdra dans leur scintillement. Bien plus, puisque tu as envié le Soleil, c’est de lui que tu recevras désormais la lumière et puisque tu as été injuste avec la Terre, tu resteras dans son ombre chaque fois qu’elle passera devant toi !


A peine ces mots prononcés, la Lune commença à décroître et sa lumière à pâlir. Les étoiles scintillèrent. La Terre lui jeta son ombre et le Soleil lui dispensa un reflet blême.
La Lune se mit à pleurer et entre deux sanglots elle articula :
- Pardonne mon orgueil, Dieu ! Ne m’abandonne pas.
Dieu répliqua :
- Je ne peux revenir sur mes paroles mais Je peux t’accorder au moins la consolation de savoir que jamais les étoiles ne t’abandonneront. Elles resteront à ta suite et les Juifs compteront d’après toi les jours, les semaines et les mois. C’est à partir des étoiles, qu’ils détermineront le commencement et la fin du jour.

Depuis ce temps, les étoiles accompagnent la Lune et les Juifs règlent leur calendrier d’après ses cycles. Ils débutent leur journée au moment où les trois premières étoiles apparaissent dans le ciel. Lorsque le croissant de Lune commence à grandir, ils récitent dans sa clarté la prière spéciale. La Lune approche alors de sa plénitude, elle sort de l’ombre de la Terre et se sent à ce moment la plus heureuse, en oubliant son ancienne faute.